Rouler en chargeant sa batterie: deux solutions de "route électrique" testées en France

A quarante kilomètres au sud-ouest de Paris, sur l'autoroute A10, un panneau jaune annonce: "Ici, nous testons la recharge dynamique sur autoroute", l'une des solutions qui pourrait permettre d'accélérer la décarbonation du transport routier.
Hormis ce détail, difficile de deviner qu'un consortium mené par Vinci expérimente depuis septembre à Angervilliers (Essonne) la recharge par induction, sans contact, pour les véhicules électriques.
Sur la voie de droite, seul un revêtement plus sombre suggérant une réfection récente trahit le tronçon test. Mais, dix centimètres sous la chaussée, 900 bobines de cuivre alimentées par le réseau électrique et générant un champ électromagnétique se succèdent, sur 1,5 kilomètre.
Pour ces tests, quatre prototypes (poids lourd, bus, utilitaire et voiture) se mêlent au flot de véhicules empruntant cet axe. "C'est une première mondiale sur une autoroute" ouverte, indique à l'AFP Pierre Delaigue, responsable du projet chez Vinci Autoroutes.
Au passage d'un véhicule équipé de bobines réceptrices, chaque dispositif enfoui "le détecte et lui envoie une impulsion", ce qui "fournit de l'énergie régulièrement tout au long du trajet", explique Guillaume Demond, chargé du projet chez Electreon, startup israélienne conceptrice du système de recharge.
Les bobines réceptrices, des plaques d'une quarantaine de kilogrammes mesurant 1,3 mètre sur 80 centimètres, peuvent être installées sur des véhicules existants. Et à terme, elles pourront être produites industriellement par Hutchinson, partenaire du projet, pour une intégration dès la construction.
Selon les premières mesures de l'université Gustave-Eiffel, la puissance transférée (200 kW en moyenne) est suffisante pour recharger des camions.
"Avec une telle puissance, la moitié va au moteur et la moitié va recharger la batterie. On gagne un kilomètre d'autonomie par kilomètre parcouru pour un poids lourd et deux à trois kilomètres d'autonomie par kilomètre parcouru pour un véhicule léger", observe M. Delaigue.
Un résultat encourageant puisque l'induction est l'une des trois technologies testées actuellement pour développer la "route électrique" (Electric Road System, ERS en anglais), un système de recharge de véhicules électriques en circulation qui devrait faciliter la décarbonation du transport routier, majoritairement effectué aujourd'hui par des camions à moteur diesel.
Conduction par le sol
Les deux autres solutions nécessitent un contact. La conduction aérienne par caténaire, inspirée du ferroviaire, est privilégiée en Allemagne tandis que la conduction par le sol est aussi expérimentée en France.
A Saint-Maurice-de-Rémens (Ain), à près de 500 kilomètres de Paris, un ancien site militaire reconverti en centre d'essais routiers est ainsi le théâtre de tests d'une solution d'alimentation par le sol (APS).
Les porteurs du projet "100% français" eRoadMontBlanc - la société d'autoroutes ATMB, Alstom, l'université Gustave-Eiffel et les PME Pronergy et Greenmot – mènent actuellement des essais sur une route aménagée sur 420 mètres avec "une piste d'alimentation qui s'intègre dans la chaussée", précise Patrick Duprat, directeur de la R&D et de la compétitivité chez Alstom.
Adapté d'une technologie développée dans les années 2000 par Alstom pour le tramway de Bordeaux, ce système utilise des "rails" moulés dans une résine pour s'intégrer au revêtement de la route sans aspérité.
Pour capter le courant, un bras articulé installé sur le véhicule vient faire glisser un patin sur les courts segments conducteurs des rails, alimentés uniquement au passage d'un véhicule de façon automatique.
Les tests doivent durer trois à six mois", indique Florian Grange, chef de projet Innovation chez ATMB. Les résultats seront ensuite transmis au ministère des Transports qui devra valider un passage en "phase 2".
Au-delà des différences techniques et de leur degré d'avancement, l'objectif des deux projets – soutenus financièrement par Bpifrance et par le plan d'investissements d'avenir France 2030 – est d'"essayer de montrer qu'il y a un modèle économique rentable" pour les ERS, note Nicolas Hautière, de l'université Gustave-Eiffel, qui participe au projet alpin.
"Le but c'est d'avoir des tarifs abordables à terme", observe de son côté M. Demond en soulignant que l'induction "ce n'est pas une option (seulement) pour les Porsche".
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