L'oenotourisme en effervescence en Champagne, surfant sur l'effet Unesco

"On a l'impression de se promener dans une peinture", s'extasie Tyler Ryan, un touriste américain visitant le Pavillon Ruinart à Reims, l'une des vitrines du boom de l'oenotourisme en Champagne, dix ans après son inscription au patrimoine mondial de l'Unesco.
La plus ancienne maison de champagne, propriété du géant du luxe LVMH, a métamorphosé depuis un an son accueil du public avec ce pavillon aux airs de pagode signé Sou Fujimoto, l'une des stars de l'architecture japonaise contemporaine, à côté de ses crayères, ces profondes caves naturelles en craie qui se visitent.
Employé de la franchise de basket NBA des Bucks de Milwaukee, Tyler Ryan et sa femme Taylor, infirmière, expliquent à l'AFP être venus en France fêter le premier anniversaire de leur voyage de noces. En deux étapes: la Champagne, puis Paris.

Taxes Trump ou pas, "nous buvions déjà du champagne pour les grandes occasions et nous allons continuer à en boire", sourit le couple.
L'oenotourisme "est reparti comme jamais, avec un public qui n'est plus le même", ce sont "des gens qui voyagent d'abord pour le vin", estime Olivier Livoir, "responsable de l'hospitalité" chez Ruinart.
Un relais de croissance bienvenu pour la filière champagne, touchée depuis cette année par les droits de douane des Etats-Unis sur les produits européens.
Musées, bars et hôtels chics
Dix ans après l'inscription de ses coteaux, maisons et caves au patrimoine mondial, l'oenotourisme "est en train d'exploser" en Champagne, constate aussi Séverine Couvreur, présidente de la Mission Unesco.

Un nombre impressionnant de projets a vu le jour ces dernières années: rénovation du musée du vin de Champagne à Epernay, reconversion des anciens pressoirs de Pommery en un musée interactif à Aÿ-Champagne, hôtels de luxe et restaurants assemblant gastronomie et dégustation de vins: Taittinger a ainsi ouvert sa propre table en juin à Reims.
Parmi d'autres initiatives en cours, la maison Dom Pérignon (LVMH là encore) doit démarrer en décembre la restauration de l'ancienne abbaye Saint-Pierre d'Hautvillers, berceau du champagne, pour une réouverture prévue en 2028 sous le signe de l'oenotourisme.
Dans un ancien hôtel particulier au coeur de Reims, la jeune maison Thiénot a inauguré en septembre "Le 3", un lieu proposant sur 5.000m2 un circuit oenotouristique immersif, bientôt flanqué d'un hôtel cinq étoiles et d'un bar à champagne.
"C'est le boom oenotouristique de la Champagne qui a fait germer cette idée", explique à l'AFP Olivier Lamaison, le directeur général du "3". Il y a "un fort enjeu commercial" dans ce projet, reconnaît Stanislas Thiénot, co-dirigeant de cette maison indépendante et désireuse de cibler davantage le grand public.
"Eviter le surtourisme"
Le nombre de nuitées à Reims a bondi de plus de 60% entre 2016 et 2023, atteignant 1,8 million. Et les emplois touristiques locaux ont augmenté de plus de 30% sur la même période pour atteindre 8.240 postes, selon une récente enquête de l'Agence d'urbanisme, de développement et de prospective de la région de Reims.

"Cette hausse des emplois est homogène sur tout le territoire" et "surtout sensible dans les zones périphériques" souligne Mme Couvreur.
Car l'inscription Unesco va au-delà de "zones coeur" comme Reims et Epernay, engageant également 320 villes et villages de l'AOC Champagne dans la Marne, l'Aube et l'Aisne.
Ainsi "on arrive aussi à éviter le surtourisme" car "il n'y a pas qu'un seul lieu qui se visite, mais une multitude d'expériences", vante encore Mme Couvreur.
La Mission Unesco veut dorénavant anticiper "des flux qui favorisent la mobilité, pour que les habitants n'en souffrent pas", ajoute-t-elle.
Dès 2023, Hautvillers et Aÿ-Champagne ont pris des arrêtés plafonnant le nombre de locations touristiques autorisées dans leurs communes. Epernay vient de les imiter, alors que le nombre de ces meublés recensés dans la ville - plus de 420 - a décuplé depuis 2019, selon la mairie.
A Aÿ-Champagne, des investisseurs locaux, mais aussi étrangers, "achetaient des biens assez conséquents" et à un prix élevé pour les "rediviser" ensuite, explique à l'AFP Dominique Collard, le maire de cette commune.
"On est fier de la montée du tourisme en Champagne, mais il faut essayer de trouver le bon équilibre", car se loger sur Aÿ est devenu "compliqué" et sa population décline, souligne l'élu.
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