Deux associations saisissent la HATVP pour alerter contre le lobbying de Shein

A quelques jours de l'examen au Sénat de la loi sur la fast fashion, deux associations font monter la pression sur Shein et demandent à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) "d'exercer son droit de contrôle" sur les activités de lobbying de l'entreprise.
Les Amis de la Terre et l'Observatoire des multinationales souhaitent attirer l'attention de la HATVP sur de "potentielles irrégularités dans les déclarations d'activités de représentation d'intérêts du groupe Shein, des sociétés liées et de ses prestataires", expliquent-elles dans leur lettre rendue publique mardi, dont l'existence a été révélée par Le Monde lundi.
La HATPV, sollicitée par l'AFP, confirme avoir reçu la lettre concernant le géant chinois du prêt-à-porter en ligne, mais précise qu'elle ne "communique pas sur le traitement qu'elle réserve aux signalements qu'elle reçoit".
Les "potentielles irrégularités" pointées dans la lettre des associations sont notamment des informations manquantes pour les années 2023 et 2024 et des formulations "vagues et non-informatives", affirment les associations.
Contacté par l'AFP, Shein affirme qu'elle "déclare les actions de représentation qu'elle mène" en "conformité avec les règles de la HATVP", et ce "en précisant, à chaque fois l'objet des actions et les personnes concernées". L'entreprise, fondée en Chine mais basée à Singapour, assure rester "engagée à agir en transparence (...) comme le font les entreprises dans le cadre de leurs activités en France".
Les associations pointent du doigt, parmi les personnalités liées à Shein, l'ancien ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, recruté par l'entreprise fin 2024 pour l'accompagner dans sa démarche de responsabilité sociétale (RSE) au sein d'un comité consultatif.
"Christophe Castaner a pris publiquement position contre la loi fast fashion et confié aux médias avoir été embauché par Shein au travers de sa société de conseil Villanelle Conseil, qui se présente publiquement comme spécialisée dans la représentation d'intérêts", notent Les Amis de la Terre dans leur communiqué.
"Pourtant, aucun élément sur cette prestation de conseil n'est publié dans les déclarations faites à la HATVP par Shein et Villanelle Conseil", s'étonne l'association.
A l'AFP, Christophe Castaner assure que "le contrat entre Villanelle Conseil et la société représentant Shein n'est pas un contrat de lobbying mais d'appui et de conseil". L'ancien ministre de l'Intérieur ajoute être convaincu que la HATPV "fait et fera bien son travail".
Deux autres personnalités sont également mentionnées par Les Amis de la Terre et l'Observatoire des multinationales: l'ex-secrétaire d'Etat aux droits des victimes Nicole Guedj et l'ancien patron de la fédération française de l'assurance Bernard Spitz, membres du même comité consultatif que Christophe Castaner.
"Ingérence étrangère"
Selon Shein, "les membres de ces comités ont un rôle purement consultatif; ils ne font pas de lobbying pour notre entreprise et toute affirmation contraire est entièrement diffamatoire", a déclaré le groupe à l'AFP.
Autre grief des Amis de la Terre et de l'Observatoire des multinationale à l'encontre de Shein consignée dans la lettre: le risque d'ingérence étrangère.
Cette "possibilité d'ingérence étrangère, qui sera bientôt contrôlée par la HATVP, rend d'autant plus importante la transparence sur ses activités de représentation d'intérêt", expliquent les deux associations.
"Nous notons à ce propos que Shein a recruté comme chargé des affaires gouvernementales M. Fabrice Layer en août 2023", qui "occupait auparavant des fonctions similaires pour un autre groupe chinois, Huawei, lequel fait aujourd'hui l'objet d'une enquête pour corruption au niveau des instances européennes", avancent à ce propos Les Amis de la Terre et l'Observatoire des multinationales.
Ce signalement intervient à l'approche de l'examen du projet de loi sur la fast fashion, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale en 2024, et déjà examiné en commission par la Haute assemblée en mars.
Le Sénat l'a notamment modifié pour la recentrer et pour préciser les contours de la "fast fashion", ce qui a entraîné une levée de boucliers de la coalition Stop Fast Fashion, qui rassemble 14 associations environnementales et des droits humains dont Emmaüs, France Nature Environnement, Les Amis de la Terre et Zero Waste.
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