Entretien avec Christopher Dembik, Conseiller en stratégie d'investissement chez Pictet AM
Pour trouver du rendement, il faut détenir des actions américaines en portefeuille...

Boursier.com : La décorrélation entre le marché actions américain et français depuis quelques semaines est-elle à mettre avant tout sur le compte de la victoire de Trump ou de l'inquiétude concernant la situation politique en France ?
Jusqu'au 7 juin dernier, l'indice principal CAC 40 était en tête des meilleures performances boursières européennes. La dissolution a tout changé. On observe une corrélation positive entre le coût d'emprunt de la France, qui a augmenté par rapport à celui des autres grands pays européens, et le CAC 40. C'est ce qui explique en grande partie la mauvaise performance de l'indice. C'est même très mauvais si on compare aux autres indices européens. Hors dividendes réinvestis, afin de pouvoir faire des comparaisons pertinentes, le CAC 40 est le seul grand indice européen en baisse depuis janvier. À l'inverse, l'indice espagnol Ibex 35 affiche une hausse de 18% tandis que le Dax allemand a atteint début décembre un point haut historique. C'est encore pire pour le compartiment des petites et des moyennes valeurs. Le CAC Small a perdu plus de 20% depuis le 7 juin. On est donc en bear market. Il perd plus de 12% depuis le début de l'année. La sous-performance par rapport aux petites valeurs européennes est de 20%...et de 35% par rapport aux petites valeurs américaines. Les valorisations sont certes attrayantes. Mais cela ne veut rien dire puisqu'il n'y a pas d'acheteurs en face. Les volumes échangés sont atones. Les gérants ont déserté ce compartiment de marché. Il ne reste que quelques particuliers disposés à prendre de gros risques. La volatilité est élevée et les chutes du cours des actions souvent de plus de 50% depuis le début de l'année.
Boursier.com : La situation peut-elle perdurer longtemps ?
Le décalage de performance boursière entre la France et le reste du monde pourrait durer à la faveur de la crise politique dans laquelle est plongé le pays et de l'incapacité de la Chine à relancer massivement son économie, ce qui est négatif pour les valeurs du luxe, qui sont surreprésentées au sein du CAC 40. Le risque est élevé d'assister à une décollecte d'épargne sur les actifs français au profit de produits exposés sur les indices et les titres étrangers, en particulier américains. C'est déjà en train de se produire. Mais cela risque de prendre de l'ampleur dans les mois à venir. Les épargnants sont rationnels : pour trouver du rendement, il faut détenir des actions américaines en portefeuille et certainement réduire, au moins à court terme, son exposition aux actifs boursiers français.
Boursier.com : Doit-on craindre une sous-performance du marché français tant que la question politique n'est pas solutionnée ?
Probablement. Mais il faut aussi reconnaître que la Bourse de Paris souffre d'une myriade de problèmes structurels : faiblesse des volumes et de la profondeur de marché, faible représentation de l'industrie, développement des ETFs qui favorise l'essor des flux financiers vers le marché boursier américain.
Boursier.com : Quelles sont vos anticipations quant aux prochains rendez-vous de la Fed et de la BCE ?
La route tracée semble plutôt limpide : politique des petits pas avec une baisse des taux directeurs de 25 points de base des deux côtés de l'Atlantique.
Boursier.com : Quels sont vos secteurs favoris pour 2025 ?
Les actions américaines, en particulier celles du numérique, sont incontournables. Trois facteurs vont continuer de les soutenir : les rachats d'actions qui devraient dépasser 1000 milliards de dollars cette année et croître au-delà en 2025 ; la solidité financière des entreprises du S&P 500 avec une marge nette qui est proche de ses points hauts à 10,5% ; la bonne santé de l'économie américaine avec une croissance qui devrait être proche de 2% l'an prochain. Les énergies renouvelables : c'est contrariant car beaucoup d'analystes s'attendent à ce que le secteur soit pénalisé par une présidence Trump. En réalité, elles bénéficieront d'une demande croissante des acteurs de la tech et de l'IA qui ont besoin à tout prix d'une énergie abondante à bas coût. Amazon et Google sont parmi les principaux acheteurs d'énergie renouvelable aux États-Unis, par exemple.
Boursier.com : Un mot sur le Bitcoin, au-dessus des 100.000$ et qui semble présenter un statut d' " or numérique "...
Considérer que le Bitcoin relève uniquement de la spéculation est une vision étriquée. C'est désormais un actif financier à part entière. Nous avons constaté que l'évolution du cours du Bitcoin est étroitement liée à sa rareté et à la direction des taux à 10 ans aux États-Unis. Pour ceux qui souhaiteraient investir, il est probablement intéressant de se pencher sur ces éléments.
Les informations et conseils rédigés par la rédaction de Boursier.com sont réalisés à partir des meilleures sources, même si la société Boursier.com ne peut en garantir l'exhaustivité ni la fiabilité. Ces contenus n'ont aucune valeur contractuelle et ne constituent en aucun cas une offre de vente ou une sollicitation d'achat de valeurs mobilières ou d'instruments financiers. La responsabilité de la société Boursier.com et/ou de ses dirigeants et salariés ne saurait être engagée en cas d'erreur, d'omission ou d'investissement inopportun.
- 0 news.votes.details.count
- 0 news.votes.details.count
- 0 news.votes.details.count
- 0 news.votes.details.count
- 0 news.votes.details.count