Entretien avec Ariane Hayate, Gérante du fonds Tricolore Convictions chez Edmond de Rothschild AM
La hausse des droits de douane ne devrait pas avoir d'impact direct significatif sur les bénéfices des acteurs du luxe

Boursier.com : En Chine, la demande pour les produits de luxe s'érode, est-ce un phénomène passager ?
A.H. : Le marché chinois reste sous pression, en grande partie en raison d'un contexte macroéconomique défavorable. La confiance des consommateurs se stabilise à des niveaux historiquement bas, et 75% du patrimoine des ménages chinois étant lié à un marché immobilier en crise, l'impact psychologique est notable. Par ailleurs, la politique de prospérité commune promue par les autorités depuis quelques années a contribué à une évolution des comportements d'achat, les consommateurs se sont détournés des logos et signes ostentatoires, privilégiant des produits plus discrets. Cela dit, la désirabilité pour les produits de luxe reste bien ancrée chez les consommateurs chinois, je pense donc qu'il s'agit d'un phénomène avant tout conjoncturel. Il faut néanmoins noter qu'aujourd'hui les dépenses discrétionnaires s'orientent beaucoup plus vers le segment de l'expérience comme les voyages, le sport, la gastronomie... qui restera une catégorie concurrente.
Boursier.com : La hausse des tarifs douaniers risque-t-elle d'impacter les acteurs du luxe ?
A.H. : Avec l'essentiel de la production des sociétés de luxe en France, Italie et Suisse pour l'horlogerie, nous sommes effectivement en droit de nous poser la question. La hausse des tarifs ne devrait pas avoir d'impact direct significatif sur les bénéfices des acteurs du luxe compte tenu de leur exposition limitée autour de 20% en moyenne au marché américain, de leurs marges brutes élevées et de leur pricing power qui leur permet d'ajuster les prix si nécessaires, pour compenser ces effets. En revanche, le climat ambiant et la baisse récente de la confiance du consommateur impacte les dépenses au sein du secteur du luxe. Certaines sociétés comme LVMH, Kering ou Burberry, indiquent déjà une détérioration des dépenses aux Etats-Unis, mais aussi de la part des touristes américains en Europe. L'impact indirect est donc notable.
Boursier.com : Quelles sont les nouvelles tendances chez les jeunes clients ? Certaines marques tirent-elles leur épingle du jeu ?
A.H. : Après une période post-Covid marquée par une forte consommation des produits de luxe et une envolée des prix notamment en maroquinerie, on observe un phénomène de "?trading down?" chez les consommateurs les moins aisés. Ceux-ci se tournent vers des marques plus accessibles comme Coach, Ralph Lauren ou Polène, qui ont le vent en poupe. À noter aussi le succès fulgurant de la marque MiuMiu de Prada Group depuis plus d'un an, une marque qui a beaucoup innové et qui a mené des campagnes très réussies sur les réseaux sociaux. En parallèle, les clients les plus fortunés privilégient toujours des maisons ultra-haut de gamme telles que Brunello Cucinelli, Loro Piana du groupe LVMH ou encore Hermès. Enfin, le segment joaillerie reste particulièrement résilient au sein du secteur du luxe. Des marques comme Cartier et Van Cleef & Arpels du groupe Richemont continuent d'afficher une croissance à deux chiffres. En période d'incertitude, certains consommateurs considèrent la joaillerie comme une forme d'investissement ou de valeur refuge, d'autant que le cours de l'or est à son plus haut.
Bousier.com : Qu'avez-vous fait sur la thématique au sein de vos portefeuilles.
A.H. : Au sein de notre portefeuille Tricolore Convictions, nous restons sous-pondérés au secteur du luxe dont les prochaines publications ne devraient pas encore montrer de signes encourageants. Au sein des titres français, nous avons allégé nos titres LVMH sur les derniers trimestres, sommes absent de Kering, dont la principale marque Gucci ne donne pas encore de signe de redressement et restons exposés à Hermès qui devrait encore publier des croissances organiques proches de 10% alors que le secteur dans son ensemble devrait au mieux rester stable cette année. Sur nos portefeuilles européens, au sein du luxe, nous privilégions des titres comme Richemont ou encore Ferrari.
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