J-1 avant le marathon budgétaire, les forces politiques fourbissent leurs armes

A la veille d'un débat budgétaire inédit sous la Ve République, les forces politiques, tout en promettant de jouer le jeu du parlementarisme, continuent à fourbir leurs armes pour tenter de modifier la copie du gouvernement et d'arracher des victoires.
Pour la première fois depuis 1958, les parlementaires vont débattre dans un contexte très particulier: non seulement le gouvernement ne dispose pas de majorité à l'Assemblée, mais il a renoncé à l'article 49.3 de la Constitution qui lui a permis depuis 2022 de faire adopter, sans vote, tous les budgets.
Les passes d'armes vont débuter lundi: l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2026, consacrée aux recettes de l'Etat, démarre en commission à l'Assemblée où quelque 1.800 amendements ont été déposés.
Dans l'hémicycle les députés repartiront de la copie initiale du gouvernement, mais le passage en commission servira tout de même de révélateur des positions des uns et des autres.
"Pas d'illusions"
Les groupes ont promis de ne pas faire d'obstruction afin de ne pas dépasser les délais constitutionnels pour voter les budgets.
Mais que ce soit pour celui de l'Etat ou de la Sécurité sociale, chacun va tenter d'arracher des victoires puisque, sans 49.3 possible, c'est la version amendée, issue des débats, qui sera théoriquement soumise au vote à la fin de l'année.
La gauche, PS en tête, espère notamment revenir sur l'année blanche, le gel des prestations sociales et compte réintroduire la taxe Zucman sur les hauts patrimoines.

"Avec ce gouvernement, on va avoir un dialogue permanent où ils seront ce qu’ils sont, la droite, et nous serons ce que nous sommes, la gauche. C’est la meilleure façon de dégonfler l’extrême droite", veut croire le premier secrétaire du PS Olivier Faure dans un entretien à Mediapart.
Le président de la Commission des Finances de l'Assemblée, l'Insoumis Eric Coquerel, lui, ne veut pas se faire d'"illusions" : "il n'y aura pas de majorité pour passer beaucoup des mesures" voulues par la gauche. Au final, l'objectif de La France insoumise sera donc de "battre", ne pas voter, ce budget.
A droite, malgré leurs divergences, Les Républicains promettent de lutter contre les hausses d'impôts et pour une baisse de la dépense publique.
Et le Rassemblement national pourrait remettre sur la table la suppression de l'Aide médicale d'Etat pour les sans-papiers, une ligne rouge pour la gauche.
"Appel à la lucidité"
Face à cela, le camp gouvernemental appelle au compromis.

"Ne pas avoir de budget serait un aveu d'impuissance collective énorme", a mis en garde la ministre chargée des Comptes publics Amélie de Montchalin, son collègue à l'Economie Roland Lescure lançant "un appel à la lucidité" et "la responsabilité".
La dette française apparaît de plus en plus vulnérable sur les marchés.

Vendredi, l'une des plus grandes agences de notation, S&P Global Ratings, a abaissé d'un cran la note de la France, invoquant une incertitude "élevée" sur les finances publiques. Fitch avait dégradé sa note en septembre et la décision de Moody's est attendue vendredi.
La promesse de suspension de la réforme des retraites, enjeu majeur pour permettre à Sébastien Lecornu de se maintenir, continue d'agiter la classe politique.
"Je considère que cette suspension est en réalité une abrogation. Le débat est à présent renvoyé à l'élection présidentielle", affirme Olivier Faure.
Mais le gouvernement a fait le choix d'inscrire cette promesse dans un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale. Et certains craignent que cette voie lui permette de ne pas acter la suspension en cas d'enlisement des débats et de recours à des ordonnances pour faire passer le budget.
"Il n'y a ni entourloupe ni plan caché", a assuré la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon au Parisien, le Premier ministre "veut permettre à l'Assemblée de débattre".
Pas de quoi convaincre le RN et LFI qui demandent à Sébastien Lecornu "une lettre rectificative" permettant de modifier le projet de budget de la Sécu avant son examen.
"Cela fait partie des options que nous avons demandées au Premier ministre", a déclaré à l'AFP Pierre Jouvet, le secrétaire général du PS. "On regarde tout et on réfléchit à tout", a commenté de son côté un conseiller gouvernemental.
Cette piste n'est pas envisageable pour le président (LR) du Sénat Gérard Larcher, qui a estimé sur RTL/Public Sénat que cela "amputera de 15 jours" les débats à la chambre haute. Il a aussi mis en garde contre un éventuel recours aux ordonnances, une "négation du Parlement".
"Si ce sont des ordonnances qui font office de pseudo 49.3, la censure sera là", a aussi averti Olivier Faure.
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